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Protester à travers de belles photos

Tim est un activiste à vélo, photographe et cinéaste. Pour muli, il a développé un nouveau langage visuel avec lequel il souhaite raconter des histoires qui marquent les esprits.
01.07.2022 - Menschen Orte Fahrräder

Tim, tu fais partie des tout premiers utilisateurs du muli et du gères le blog radpropaganda.org. À Hambourg, tu as déjà déclenché de nombreuses initiatives cyclistes. Notamment des ateliers de vélo pour des réfugiés à Kampnagel, l’espace « Raum für Fahrradkultur » dans le centre ville de Hambourg – mais aussi bon nombre d’actions pour le vélo sur les réseaux ou de manière « classique » sur site, dont tu es l’instigateur. As-tu constaté une évolution au cours de ces années ?

De manière générale, la circulation en vélo est devenue un thème des débats publics. Beaucoup de choses pour lesquelles nous avons manifesté avec les « Masses critiques » ou que nous avons diffusé sur les réseaux sont en cours de réalisation aujourd’hui. À Hambourg aussi, la nouvelle infrastructure dédiée aux vélos émerge peu à peu. Des subventions sont versées pour l’achat de vélos cargo et la location de vélos d’entreprises, ainsi que pour le partage public des vélos. Toutes ces mesures vont dans le bon sens. Surtout en matière d’infrastructure, les confinements ont certainement contribué à ce développement. Dans les villes telles que Paris et Berlin, les voies de circulation des voitures ont muté en pistes cyclables impromptues pendant la pandémie. À Hambourg, les responsables politiques ont été plutôt hésitants. Tandis qu’ailleurs, les pistes cyclables protégées ont été pérennisées, quelques essais de circulation temporaires isolés ont été tentés ici – matérialisés par des traits jaunes sur les voies. Néanmoins, ça évolue. Deux ans plus tard, les premières pistes cyclables protégées sont mises en place durablement. Beaucoup de choses prennent du temps et ne sont pas toujours cohérentes, mais il y a des raisons à cela : Au niveau des réglementations – mais aussi dans les esprits – la planification est toujours autocentrée. Lorsqu’on parle de circulation, on ne pense qu’à la circulation des voitures. On le voit encore bien trop souvent lors de l’implémentation de nouvelles infrastructures routières.


Les progrès et les débats plus étendus ont-ils fait évoluer aussi ta perspective et ta manière d’aborder la thématique ?

Naturellement, puisque tout cela est un processus. Les changements dans les débats, la situation sur site, la situation personnelle et l’expérience quotidienne – tout fait évoluer constamment la perspective. Je me préoccupe de plus en plus de ce qui se passe devant ma porte et dans ma ville. Je m’engage directement dans mon quartier pour une mobilité conviviale et je tente de démontrer et de désigner la répartition inéquitable des espaces dans la ville grâce à des exemples pratiques issues du quotidien. Ce n’est pas correct que les voitures se garent sur les pistes cyclables et les trottoirs. Que nos enfants sont enfermés dans les aires de jeu tandis que l’espace urbain public est cédé à des voitures équipées de pare-buffles.

Lorsqu’on parle de circulation, on ne pense qu’à la circulation des voitures.

Que pouvons-nous faire pour y remédier ?

Nous devons arrêter d'accepter que le trottoir devant la maison est trop dangereux pour nous promener avec nos jeunes enfants. Donc, les problèmes structurels persistent. Malgré les progrès, la route vers une ville conviviale est encore longue. Néanmoins, je pense qu’il est important de profiter des petits progrès pour renforcer et multiplier les images positives. Contrairement au passé, les développements actuels m’offrent de plus en plus d’occasions de le faire. En tant que photographe et designer, j’ai la possibilité de protester par des images positives, de documenter les évolutions et de les opposer aux images obsolètes d’hier.

En tant que photographe, tu accompagnes muli avec ta caméra, mais aussi en tant que conseiller. Tu a également réalisé les photos pour notre nouveau site Internet. Quels ont été tes motivations ? 

Mon objectif était de créer un univers visuel avec des motifs proches des personnes qui roulent beaucoup à vélo. J’ai donc recherché des « modèles » parmi mes amis et mes connaissances, par ex Badrieh ou Felix – pour les accompagner avec mon muli et un petit setup photo. L’important, c’était de limiter autant que possible les mises en scène. J’ai obtenu ainsi un mélange de photos de rue et de présence documentaire. Même si la météo n’a pas toujours joué le jeu, j’ai pris beaucoup de plaisir à travailler ainsi et je suis ravi du résultat.

Quel a été la raison de cette approche plutôt peu conventionnelle ?

Heureusement, je n’ai pas besoin d'imaginer pour muli une personne de banque d’images au style de vie conscient. Il suffit de rencontrer les personnes formidables qui circulent déjà en muli ou s’y intéressent beaucoup. Pourquoi ne pas raconter leurs histoires ? Il n’est même pas nécessaire de mettre le vélo au premier plan. Il constitue un moyen pour des fins judicieuses et il me suffit de le capter en images. Cela aide le produit et l’évolution de la circulation – et j’adore travailler avec des gens bien. J’ai du mal à imaginer une démarche plus écoresponsable.

Björn, Hafencity Hamburg
U-Bahn, Lasten/Fahrradmitnahme
Badrieh, Spielplatz Altona

Était-ce une consigne pour le shooting photo ?

Non. Je considère cela plutôt comme un processus créatif. Je me concertais directement avec Sören de muli, tout en tenant compte des commentaires et avis des protagonistes. Aucune contrainte ne m’était imposée pour la mise en œuvre. J’aime intervenir pour une marque à un moment où tout n’est pas encore figé et où je peux développer activement et intégralement mon concept. Naturellement, ce n’est pas possible à tout moment et en tous lieux. Si possible, j'essaie dès le début de ne pas me limiter à un seul rôle, par exemple celui de photographe, mais d’gir aussi sur le produit et les personnes qui le portent, afin de créer ensemble quelque chose de nouveau.

Les photos des produits réalisés dans mon atelier ont également fait l’objet d’une approche plutôt artistique. En raison des problèmes d’approvisionnement mondiaux pendant la pandémie, nous avons dû être très flexibles et étaler les shootings photo sur une longue période. Cela m’a alors permis de prendre plus de temps pour les vélos et les images d’aller plus dans les détails. Je trouve que le travail supplémentaire en a valu la peine. Je connais maintenant vraiment chaque vis et chaque boulon.


Ta longue expérience du muli a-t-elle été un avantage ?

Absolument. Je circule en muli depuis le financement participatif Startnext en 2017. Il m’a accompagné lors de mes déménagements, mes achats volumineux et mes productions photographiques. S’y sont ajoutés ensuite le siège enfant, la capote et les sorties en famille. Tout comme le muli a évolué avec moi, j’évolue à présent avec la marque.


Que souhaiterais-tu améliorer encore ? 

Nous faisons tous quelques compromis. Plus important que la « volonté de toujours tout faire correctement » est l’écoute face aux retours et à la critique, l’ouverture aux discussions et l’introspection répétée sur son propre travail. Concrètement, je suis très curieux de la nouvelle version de la capote antipluie du muli (en rigolant) et par rapport à mon travail, je trouve que le choix des protagonistes qui seront présentés dans la nouvelle version du site Internet n’est pas encore assez diversifié à mon goût. Toutefois, ce n’est que le début de la série et j’espère que nous pourrons présenter encore beaucoup de gens intéressants.


Nous espérons aussi que tu n’es pas encore arrivé au bout de ton activisme. Quels sont tes plans à ce sujet ?

Pour l’activisme fonctionne le mieux lorsqu’on crée des scénarios dans lesquels les gens peuvent découvrir en pratique un état idéal possible. C’est une des raisons pour lesquels la « Masse critique » a fait autant bouger les choses. C’est une expérience impressionnante, lorsque des milliers de cyclistes s’approprient ensemble l’espace habituellement réservé aux voitures. Et comme il n’est jamais trop tôt pour commencer, je me réjouis tout particulièrement de participer au lancement du premier « Bicibus » à Hambourg. L’action s’inspire d’une initiative à Barcelone, où les enfants se rendent à l’école en vélo tous les vendredis. Au début, seules quelques familles y participaient en vélo, rollers ou patins à roulettes, mais c’est devenu un vrai mouvement populaire. J’espère que ce sera aussi le cas à Hambourg.

Merci pour cette discussion !


Vous trouverez plus d’informations sur Tim sur instagram.com/tm_kaiser et sur tmksr.com et plus de renseignements sur la thématique de la culture cycliste sur Radpropaganda.org ou instagram.com/radpropaganda.

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